4 décennies de recherches et de résultats sur le bovin Créole, emblème du Pavillon Guadeloupe au SIA (Paris, 22 février au 2 mars 2025)

Les origines du bovin Créole remontent au XV° siècle, avec l’introduction de taurins originaires du sud de l’Europe, qui ont été métissés par la suite avec des taurins africains et zébus importés d’Afrique de l’Ouest au XVI° et XVII° siècle. Ces origines se retrouvent dans la constitution de son génome, avec des proportions à peu près équilibrées de ces trois rameaux, et dans ses caractères physiques et ses aptitudes. En particulier, le bovin Créole est très bien adapté au climat tropical et ne souffre pas de la chaleur. Les vaches Créole sont très bien adaptées pour un élevage en plein air et leur fertilité est très correcte. Le bovin Créole est résistant aux tiques et aux maladies qui leur sont associées. Enfin il exprime un bon potentiel de croissance et de qualité de carcasse et de viande, dès lors qu’il est correctement alimenté. De plus, ses performances de production peuvent être améliorées grâce un travail de sélection réalisé en race Créole pure.
Le troupeau de bovins Créole d’INRAE a été constitué en 1969, avec des animaux venant de toute la Guadeloupe (Gauthier et al, 1984). A cette époque, les techniciens de l’élevage étaient recrutés parmi des éleveurs, apportant à l’institut, des savoirs et savoir-faire patrimoniaux sur la conduite d’élevage.

Bovins Créole : transport de la canne et engraissement sur amarres de canne et de pangola, début des années 70,
Annick Cleac'h, (1974)

Depuis le début des années 80, les recherches s’inscrivent dans un partenariat continu avec la profession. Dans les élevages, le développement de croisements avec des races importées (charolais, …) pour alourdir les carcasses, ont mis en danger la race, mais ont confirmé également ses atouts. En effet les animaux croisés présentent des caractéristiques de production plus importantes, mais sont également plus fragiles, ce qui demande aux éleveurs, une technicité accrue et augmente les coûts de production.
Les troupeaux de l’unité PTEA constituent une ’pépinière’ de la race Créole. Ils sont conduits entièrement en race pure Créole, et les généalogies sont connues, depuis la création du troupeau. Ils servent à la diffusion de reproducteurs sélectionnés et de de support pour l’expérimentation, réalisée conjointement avec l’unité ASSET, qui a produit de nombreux résultats. Ces résultats ont abouti à renforcer l’utilisation du bovin Créole dans les exploitations familiales en Guadeloupe, à travers notamment le partenariat avec Sélection Créole. INRAE accompagne aussi les éleveurs dans les opérations de sélection en ferme (pointage des animaux de la race ; sélection de taureaux représentatifs) et par son expertise (conservation de semences d’insémination artificielle ; étude de la qualité de la viande, en vue de promouvoir des produits de qualité).

Vaches et veaux Créole, troupeau de PTEA, Domaine de Gardel, Le Moule, en 2017 ©INRAE/M. Moutoussamy

Après les premiers travaux de caractérisation, INRAE s’est engagé dès les années 1990 dans :

• la conservation et la sélection de la race Créole
• la reconnaissance officielle de la race,
• la définition du programme de préservation et de sélection de la race
• la création de l’Organisme de Sélection « Sélection Créole ».

Actuellement, compte tenu de l’impact du changement climatique sur les systèmes de production, les recherches portent sur les qualités d’adaptation au milieu tropical, en particulier sur la résistance aux tiques et la capacité de valoriser des ressources alimentaires hétérogènes en termes de quantité et de valeur alimentaire, notamment suivant la saison (avec l’importance de la saison sèche).

Dates clés :

• 1969 : constitution par l’INRA de son troupeau de bovins Créole de Guadeloupe,
• 1984 : description de la race, présentant des caractéristiques encourageantes pour constituer la base d’un troupeau de production de viande dans des conditions difficiles : résistance aux agressions du milieu tropical (température, humidité, pathologie parasitaire et infectieuse), pas de difficultés de vêlage, production laitière moyenne, avec un bémol sur la faible croissance des produits et une conformation médiocre. (Gauthier et al, 1984)
• 1994 : mise en place d’un laboratoire de congélation de semences à PTEA, domaine de Gardel et premières congélations de semences de taureaux Créole sélectionnés
• 1995 : définition du standard de la race et reconnaissance officielle de la race bovine Créole https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000030578634/
• 1999 : création de l’UPRA Créole, devenue Sélection Créole en 2008 https://selectioncreole.com/
• 2006 : début du projet de Centre Ressources Biologiques en Production et Santé Animales, à l’origine de la création du CRB CARARE en 2013:  https://asset.antilles.hub.inrae.fr/l-unite-asset-agroecologie-genetique-et-systemes-d-elevage-tropicaux/dispositifs/centre-de-ressources-biologiques-crb
• 2008 : mise en place de la MAEC « Protection des races menacées »
• 2010 :
  • premières inséminations animales avec des semences de taureaux Créole sélectionnés,
  • premiers travaux de génotypage (Gautier & Naves, 2011)
• 2016 : séquençage du génome entier de 23 taureaux Créole
• 2022 : projet VALOBOV : Valorisation de la viande bovine Créole
• 2023 – 2024 : signatures de sélection et identification de variants structuraux associés à l’histoire adaptative du bovin Créole (Ben Jemaa et al., 2023 et 2024)

Au SIA 2025, le Conseil Régional et la Chambre d’Agriculture de la Guadeloupe ont mis en avant le bovin Créole sur le Pavillon Guadeloupe et à l’honneur, les professionnels de la filière bovine, avec pour slogan « Le bovin Créole, notre fierté, au cœur de nos exploitations familiales ».
Sur le stand, des posters présentant l’OS Sélection Créole et les travaux d’INRAE ont été présentés au grand public. INRAE était représenté par Alain Farant (UE PTEA). Il a été interviewé par Yasser de Guadeloupe la 1ère, dans le cadre de l’émission Mès é labitid, sur le « Bèf kréyol », diffusé le 24/02/2025 (voir ci-dessous «Vu dans la presse).

Ci-contre : Alain Farant présentant les posters (© X. Xandé) qui sont accessibles en téléchargement ici et ici

Différentes animations (découpe et préparation de la viande Créole) ont été proposées du 24 au 26 février. L’inauguration du Pavillon avait pour thème central « Bèf Gwadloup » : voir photos ci-dessous (©INRAE/Alain Farant)

• Bibliographie

• Cleac'h Annick, 1974. Les progrès de l'élevage moderne en Guadeloupe. In : Cahiers d'outre-mer. N° 105 - 27e année, Janvier-mars, pp. 22-76 ; https://doi.org/10.3406/caoum.1974.2683
• Gautier D, Aumont G., Barré N., Berbigier P., Camus E., Lafortune E., Popescu P., Rulquin H., Xandé A., Thimonier J., 1984. Le bovin créole en Guadeloupe : Caractéristiques et performances zootechniques Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop., 37 (2) : 212-224. https://agritrop.cirad.fr/446640/1/ID446640.pdf
• Ben-Jemaa S. ; Adam G. ; Boussaha M. ; Bardou P. ; Klopp C. ; Mandonnet N. ; Naves M. 2023. Whole genome sequencing reveals signals of adaptive admixture in Creole cattle. Sci. Rep. 2023, 13. https://doi.org/10.1038/s41598-023-38774-7
• Ben-Jemaa S., Boussaha M., Mandonnet N., Bardou P., Naves M. 2024. Uncovering structural variants in Creole cattle from Guadeloupe and their impact on environmental adaptation through whole genome sequencing. PLoS ONE 19(8) : e0309411. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0309411
• Travaux INRAE réalisés sur le bovin Créole :  ici et  ici

• Acronymes

• CRB CARARE : Centre de Ressources Biologiques Ressources Génétiques Animales de la Caraïbe.
• MAEC : Mesure Agri Environnementale et Climatique
• UE PTEA : Unité Expérimentale Plateforme Tropicale Elevage pour l’Agroécologie https://ptea.antilles.hub.inrae.fr/
• UPRA : Unité de sélection et de Promotion de la Race
• UR ASSET : Unité de Recherches Agroécologie, génétique et Systèmes d’Elevage Tropicaux

• Bandeau et vignette : Génisses Créole, Gardel, Le Moule, en 2004, ©INRAE/M. Naves